Les marchés de conception réalisation (03/02/2021)

Un marché de conception réalisation est un marché de travaux permettant à l’acheteur de confier à un opérateur économique ou à un groupement d’opérateur une mission portant à la fois sur l’établissement des études et l’exécution de travaux (article L. 2171-2 du CCP).

La conception réalisation est une technique d’achat qui permet de déroger au principe visant à distinguer les missions de maitrise d’œuvre de celles de l’entrepreneur pour la réalisation des ouvrages ainsi qu’au principe d’allotissement.

Lorsque l’opération ne relève pas du champ d’application du livre IV de la 2eme partie du CCP (qui correspond à l’ancienne loi MOP) le recours à la conception réalisation est libre ; l’article L.2412-2 du CCP détermine certains types de marché pour lesquels aucune justification n’est nécessaire (ex : les ouvrages d’infrastructure ou de bâtiment destinés à une activité industrielle dont la conception est déterminée par le processus d’exploitation).

La loi ELAN est venue bouleverser le recours à la conception réalisation, puisque depuis son adoption les SEM et les sociétés de gestion de logements sociaux peuvent recourir à la conception réalisation sans condition (sauf pour la réalisation de logements locatifs aidés par l’État) ainsi que les CROUS jusqu’au 31 décembre 2021.

Dans tous les autres cas, le recours à la CR doit faire l’objet d’une justification de la part du maitre d’ouvrage dans les documents de consultation. Il existe deux motifs :

1- Motifs techniques liés à la destination ou à la mise en œuvre techniques de l’ouvrage – Article R.2171-1.

Les caractéristiques de l’ouvrage imposent au maitre d’ouvrage d’associer l’entrepreneur aux études. Deux types d’opérations sont visées par cet article :
→  les ouvrages dont l’utilisation conditionne la conception, la réalisation et la mise en œuvre
→  les ouvrages dont les caractéristiques, telles que de dimensions exceptionnelles ou des difficultés particulières exigent de faire appel aux moyens et à la technicité propre des opérateurs économiques.

Dès lors la conception réalisation peut être justifiée par des motifs techniques lorsqu’elle porte sur des ouvrages à grand volume impliquant une structure complexe, exceptionnels situés en sous-sol, dont la fonction essentielle est constituée par un processus de production d’exploitation qui conditionne sa conception et sa réalisation (ex : cuisines, blanchisseries, procédés de production de chaleur), nécessitant une réhabilitation lourde qui implique l’utilisation de techniques particulières de construction.

Quelques exemples :

Constituent des motifs techniques suffisants :

→  la construction d’une usine d’incinération avec valorisation énergétique des déchets ménagers et assimilés (TA Strasbourg, 10 nov. 1997, n° 97-2122) ;
→  la réalisation d’un parking souterrain (TA Lyon, 24 juin 1996, n° 9602420) ;
→  l’exhaussement de l’opéra de Lyon portant sur la réalisation d’un dôme de verre pour un immeuble de grande hauteur recevant du public (CAA Lyon, 4e ch., 29 mai 2008, n° 03LY01001).

Ne constituent pas des motifs techniques suffisants :

→  les contraintes particulières liées à la recherche de forme architecturale, la détermination des matériaux et des structures et le choix des procédés de construction concernant un atelier-relais pour dirigeables (CE, 8 juill. 2005, n° 268610) ;
→  le souci de concilier la qualité architecturale de l’ouvrage avec les exigences de solidité et de sécurité (CAA Nancy, 21 oct. 2004, n° 00NC00373) ;
→  les contraintes d’exécution, liées à la situation et à la nature du terrain (caractère inondable, présence de vestiges archéologiques), ainsi qu’aux activités culturelles et sportives que le complexe doit accueillir (CAA Nancy, 5 août 2004, n° 01NC00110) ;)
→  les travaux d’extension et de restructuration d’un collège ne présentant aucune difficulté technique particulière (CE, 28 déc. 2001, n° 221649) ;
→  un centre hospitalier dont les spécifications ne diffèrent en rien des contraintes auxquelles est assujetti tout bâtiment de même importance (TA Orléans, 28 juill. 1994, n° 99-3999) ;
→  l’urgence (CE, 17 mars 1997, n° 155573 CAA Nancy, 5 août 2004, n° 01NC00110).

2- Motifs de performance énergétique

2-1-Engagement contractuel sur un niveau d’amélioration de l’efficacité énergétique (bâtiment existant)

L’amélioration de l’efficacité énergétique doit faire l’objet d’un engagement contractuel du titulaire, il est donc nécessaire de constater le niveau d’efficacité énergétique de l’ouvrage par le biais d’un audit prévu par l’article 5 de la loi 2009-967 relative à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement. Le recours à la CR :
→  nécessité d’un niveau de référence produit aux candidats
→  nécessité de laisser dans l’AE ou les pièces demandées au titre de l’offre l’espace permettant aux soumissionnaires de s’engager contractuellement.
→  nécessité de justifier que l’entrepreneur soit présent dès les études.

2-2 - Construction d’un bâtiment neuf dépassant la réglementation thermique en vigueur (bâtiment neuf)

Cette dérogation a été mise en place par la loi ELAN (il n’y a pas encore de jurisprudence en la matière).

L’Ordre estime nécessaire :
→  d’exprimer clairement l’objectif de dépassement dans le DCE.
→  que cet objectif de dépassement permette de justifier que l’entrepreneur soit présent dès les études.
→  que le dépassement soit substantiel

Il faudrait que le maitre d’ouvrage exprime son objectif de manière chiffré ou poursuive un objectif de labélisation énergétique dépassant la RT 2012 (HPE, THPE, Effinergie+, BEPOS, Effinergedie 2013) La justification par des critères environnementaux (démarche HQE, label bas carbone ou Bâtiment Bio-sourcé) ne rentre pas dans cette catégorie, limitée aux performances thermiques.

Faire usage des marché globaux de performance énergétique semble beaucoup plus adapté aux maitres d’ouvrage souhaitant réellement mettre en place une politique de performance, ces marchés permettent de lier l’exploitant du bâtiment qui s’engage aussi sur la base d’objectifs chiffrés.

Au-delà des considérations techniques il faut s’interroger sur l’intérêt d’une procédure de conception réalisation pour les acheteurs au vu des difficultés pour les architectes d’intervenir dans ce processus comme concepteur du projet.

Nous contacter

308 avenue Thiers,
33 100 Bordeaux

Isabelle BABIN
est en charge des départements :
19, 23, 40, 64 ; 86 et 87
Véronique BACHWA
est en charge des départements :
16, 17, 24, 33, 47 et 79

T. 05 56 48 05 30
C. marchespublics.na@architectes.org

Formulaire d’alerte
Fiche Jury
Foire aux questions