Transition écologique

Vos questions en +.

Parmi les nombreux commentaires suscités par l’événement, quelques-uns n’ont pas pu être évoqués durant le direct. À l’issue de chacune des trois rencontres, nous les avons présentées aux intervenants concernés, qui vous apportent ici leurs réponses.

Le BIM peut-il être un bon outil de la transition écologique, ou serait-il au contraire contre-productif ?

Julien Cœurdevey : Après des craintes de standardisation lors de nos premières explorations du BIM, nous trouvons aujourd’hui que celle-ci est infondée et que l’utilisateur de l’outil peut l’adapter à tous les modes constructifs et de matériaux. Une fois ce doute levé, il doit être exploité pleinement pour ses qualités de décloisonnement en rassemblant les compétences sur une maquette unique, et pour ses qualités d’évitement de conflits entre ouvrages, autrement réglés de façon peu reluisante sur le chantier… Enfin, pour une pleine efficience du BIM, on est amenés à anticiper certaines réflexions. On augmente ainsi les chances de produire un avant-projet propre, consolidé sur le plan budgétaire, qui permet de dédier la phase projet aux derniers réglages et à la correcte rédaction des descriptifs des ouvrages.

Où en est-on de la récupération des eaux de pluie, dans les salles de bains et cuisines par exemple ?

Cyril Gachelin : L’eau de pluie est loin de répondre aux exigences de potabilité, notamment d’un point de vue microbiologique, voire physico-chimique. Aussi, pour éviter tout problème sanitaire, son utilisation à l’intérieur des habitations est très réglementée. Elle est strictement interdite dans les salles de bains ou les cuisines, où un risque d’ingestion existe. Seuls l’alimentation des chasses d’eau, le lavage des sols et, sous réserve de mise en place d’un traitement adapté, le lavage du linge sont autorisés à l’intérieur des bâtiments. D’autres obligations sont par ailleurs à respecter, parmi celles-ci on citera la nécessité d’une déclaration d’usage en Mairie dès lors que ces eaux sont rejetées au réseau d’assainissement collectif, l’interdiction de raccorder le réseau d’eau de pluie au réseau d’eau potable, l’identification des canalisations d’eau de pluie par un pictogramme « eau non potable » aux entrée et sortie de vannes et d’appareil ainsi qu’aux passages de cloisons et de murs, l’identification de chaque point de soutirage d’eau et de chaque WC alimenté par une plaque « eau non potable », et l’obligation de nettoyage annuel des filtres et de vidange, nettoyage et désinfection des cuves de stockage.

Est-ce qu’il existe une utilisation de la technologie qui participe à la relocalisation que vous appelez de vos vœux, ou bien les deux termes seraient forcément opposés ?

Olivier Bouba Olga : Je n’appelle pas à proprement parler à la relocalisation, je pense en revanche qu’il faut analyser la géographie des chaînes de valeur, sans doute diversifier les sources d’approvisionnement pour éviter les risques de défaut, et, dans certains cas, en effet, opter pour une relocalisation de certaines activités. Par ailleurs, les cas de relocalisation qui ont été étudiés montrent qu’un retour dans des pays développés, d’activités préalablement délocalisées dans des pays à bas coûts, suppose d’innover d’un point de vue technologique et organisationnel. L’enjeu en effet est de réduire la part de la main-d’œuvre dans le processus productif, en automatisant certaines étapes, en développant la robotisation, en favorisant également la polyvalence des salariés.

Face aux lotissements, comment pourrait-on ouvrir la voie à de nouveaux modèles urbains, éco-construits, frugaux, greffés organiquement sur la ville existante, et en lien avec les habitants ?

Patrick Rubin : Une piste pourrait être d’observer, par exemple, les travaux de la start-up ludo. Ce groupement d’architectes et d’ingénieurs propose des modèles économiques sur la mutation et la densification douce des tissus pavillonnaires existants en Île-de-France. Réunir des voisinages pour optimiser les bâtis, surélever, additionner, gagner des surfaces, offrir des mutualisations de services… Transfigurer les unités en architecture mutante est une des alternatives pour « ouvrir la voie à de nouveaux modèles urbains ». La force des maisons individuelles est d’appartenir à des propriétaires individuels, c’est aussi la faiblesse du système, sauf à prendre conscience de l’immense réserve foncière que représentent les lotissements dont les habitants seront prêts à tenter l’expérience de regroupements raisonnés bénéficiant de droits à construire sur leur propre foncier. La greffe prendra progressivement sur ces nappes pavillonnaires par le jeu des mutations générationnelles et comportementales des nouveaux propriétaires. Ce cortège d’adaptations et de partages entraînera nécessairement des changements d’attitudes dans la « décision de construire », la frugalité et l’éco-construction trouveront alors naturellement place au sein de ces nouveaux dispositifs.

n°47 - été 2020