Réemploi

Déconstruction et réemploi, Patxa Ma’.

Déconstruire et reconstruire avec le réemploi.

Anne-Marie FAGOAGA

Penser la démolition comme un gisement de matériau et comme préambule d’un nouveau projet, c’est l’ambition de l’association Patxa Ma’ depuis près de 2 ans. En France, près de 71,5 % des déchets sont issus du secteur de la construction. Leur recyclage, permettant une économie de ressources, implique une perte de performance du matériau et la sollicitation de beaucoup d’énergie. Dans ce contexte et celui d’une pénurie des matériaux, leur réemploi apparait comme une solution, embrassant la réduction de la quantité de déchets de chantier et l’impact environnemental du bâtiment.

C’est dans ce sens-là que Patxa Ma’ travaille avec pour objectif de préserver un maximum de matériaux de construction viables et valorisables, destinés à être jetés, en les réintroduisant dans le circuit de la construction. Son activité s’articule autour de chantiers de déconstruction qui consistent en la dépose propre d’éléments de constructions en vue d’une revente à prix solidaire. Les enjeux de ses activités sont multiples : réduction des déchets, préservation des ressources naturelles, relocalisation de l’économie, préservation du patrimoine local, accessibilité des matériaux. Une étude ressource en amont du chantier de déconstruction renseignera sur le potentiel de valorisation des matériaux, et guidera les choix au moment de la dépose.

Tous les matériaux présents sur le site de déconstruction ne seront pas pris en charge. Certains seront vendus uniquement sur place en magasin éphémère, quand ils demandent trop de stockage ou de manutention, et d’autres seront rapatriés dans le Patxa Stock’ en attente d’un nouveau projet.

Ces futurs projets intégrant le réemploi, commandés par des maitres d’ouvrage publics ou privés, conçu par nous, architectes, amènent de nombreux enjeux bouleversant nos savoir-faire actuels. Le schéma linéaire traditionnel de la conception du projet est bousculé et tend à laisser place à une conception plus perméable, donnant la possibilité d’accueillir, ou non, de nouveaux éléments en cours de mission. Le matériau réemployé peut être introduit en fonction de son gisement, de sa quantité, de sa localisation mais aussi de l’histoire qu’il a à raconter. Nous pourrions aussi penser la déconstruction dès la conception d’un ouvrage. Elle serait encouragée en préférant des matériaux déconstructibles et réemployables créant le moins de déchets possible. La dimension du réemploi amène une profession et une nouvelle génération d’architectes à repenser le projet, de sa conception à sa mise en œuvre, d’autant plus que ces questions captivent notre nouvelle pratique.

n°55 - Été 2022