Regard

Architecture et nature

Duncan Lewis, architecte

La nature a toujours réussi à s’infiltrer dans l’architecture. Il s’agit d’un va-et-vient entre le vrai et le faux, l’opaque et le lisible, le caché et l’évident.

La nature n’est pas un alibi idéologique ou esthétique qui habille l’architecture. La modernité a coupé l’homme de son environnement. Il faut recréer les liens entre l’homme et son environnement, où le temps n’est jamais figé, où l’on fait place à ses rêves.

La relation entre l’architecture et la ville fera place à une nouvelle relation entre l’architecture et la nature. L’urbanisation excessive de la majeure partie du territoire est devenue une question vitale et l’enjeu est important. Il faut donner sa chance à une nouvelle culture urbaine dans laquelle une nouvelle nature et une nouvelle densité humaine sont développées conjointement afin qu’elles répondent aux besoins et aux valeurs réelles des hommes.

En travaillant dans ce cadre, l’architecture pourrait minimiser sa présence imposante et enfin penser à sa nouvelle relation et à son rapprochement avec son environnement.
Le projet d’EKKO est construit sur une ancienne friche industrielle de la rive droite de Bordeaux autour de la question du changement climatique et pour penser la ville autrement comme un nouveau paysage habité.

Sur une parcelle de 1 800 m2, il propose cinquante logements dans un volume construit de 15 000 m3 et il produit un espace extérieur partagé en trois dimensions de 6 635 m3.
L’ensemble de cet espace est une grande pièce collective plantée sur chacun de ses cinq niveaux d’arbres flottants. Elle appartient à tous et chacun  ; des habitants en gèrent une partie comme espace de travail, de restauration ou de détente.

Elle résout la question de la densité dans la ville et temporise aussi le climat, la lumière, le vent, le soleil, la fraîcheur de l’air, pour que l’on y vive bien. Il existe des similitudes avec la serre froide d’Estufa Fia à Lisbonne, au Portugal.

Plus qu’un jardin d’hiver, c’est un lieu de vie qui s’adapte aux différentes périodes de l’année et induit ses qualités aux espaces intérieurs des logements, dans une idée de compagnonnage avec la nature qui dépasse largement la stricte question du paysage ou l’idéologie du patrimoine, une idée sensuelle qui ajoute aux exigences du visible la joie du tactile, voire le plaisir des odeurs.

Nous construisons avec la nature pour reconnecter l’homme avec son environnement.

N°53 - hiver 2021